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LIGURES

page ouverte le 03;08.2007 dernière mise à jour 04/08/2007 10:57:21

 

* M.N Bouillet. DUHG. (1863) : 

"LIGURIE, Liguria, contrée de l'Italie septentrionale ancienne, formait la partie S. O. de la Gaule Cisalpine; elle s'étendit d'abord du côté du nord jusqu'au Pô, mais fut ensuite restreinte aux pays situés entre la mer et l'Apennin; ses limites étaient à l'E. la Macra, à l'O. le Varus (Var). Les habitants, dits Ligures (c.-à-d. montagnards), étaient divisés en nombreuses peuplades, savoir : 1° au N. les Vagiens, les Venènes, les Statielles, les Cerdiciates, Célélates, Ilvates, Casmonates, Emburiates, Magelles, Vibelles; 2° dans les Apennins, sur le versant méridional, les Hercates, les Lapicins, les Garules, les Friniates; 3° sur la mer, de l'E. à l'O., les Apuans, les Ingaunes, les Ietémèles, les Védiantiens. On donne aussi comme Ligures les Taurins, les Libiques et les Lèves, qui habitaient au N. du Pô, et dans le S. E. de la Gaule Transalpine. Les Ligures semblent avoir été de même race que les Ibères. Comme toutes les tribus montagnardes, ils étaient braves et jaloux de leur indépendance. Rome ne les soumit qu'après 38 ans de guerre (200-163 av. J.-C.). lis furent plus tard (118) compris dans la Province romaine.

LIGURIENNE (République), état créé en 1797, lors de la conquête de l'état de Gênes par les Français, cessa de subsister en 1805 et fut fondu dans l'empire français, auquel il fournit les départements des Apennins, de Gênes et de Montonotte. Aujourd'hui cette république forme à peu près la division de Gênes, dans les Etats sardes.

LIGUSTIQUE (golfe ou mer), Ligusticus sinus ou Ligusticum mare, auj. le golfe de GÊNES.

* L. Quicherat et A. Develuy (1868) :

- Ligures : cf. Tite Live; Virgile : Liguriens; habitants de la Ligurie.

- Liguria : cf. Pline. Ligurie, province maritime de la Cisalpine.

- Ligurinus : cf. Gratius Faliscus : de Ligurie.

- Ligusticum mare : cf. Pline : Mer ligustique ou ligurienne (entre l'Italie et la Gaule). 

- Ligusticus : cf. Ciceron, et Ligustinus, cf Tite live : De Ligurie.

- Ligusticus sinus : cf. Isidore de Séville : Golfe Ligustique (aujourd'hui Golfe de Gênes)

- Ligustini : cf Pline : Ligurens, habitants de la Ligurie.

* A. Chaboseau (1926) :

CHAPITRE IV

L'ANTIQUITÉ PRÉROMAINE

**********


CELTES, LIGURES ET IBÈRES. — CELTES ET GAULOIS. 

LES PEUPLADES ARMORICAINES AVANT L'ARRIVÉE DE CÉSAR. — L'ORIGINE DES VÉNÈTES. — LE DRUIDISME.


Rome et, par elle, l'Europe, ont jadis reçu de l'Orient un art, une littérature, successivement deux religions, bref, une civilisation, et à celle-ci le monde moderne doit le plus clair de ce qu'il conçoit et réalise — de ses modes de conception et de ses principes de réalisation. D'autre part, on s'est mis, depuis deux siècles, à découvrir les nations antiques de l'Egypte, du bassin du Tigre et de l'Euphrate, de l'Iran, de l'Inde, de la Chine, et l'on a constaté que, dans tous ces pays, dès une époque très lointaine, la pensée humaine avait atteint une profondeur et acquis une subtilité, qui inclinent à juger que, par comparaison, nos ancêtres d'il y a deux mille ans étaient presque des sauvages.

On en a conclu que tout avait pris naissance en Orient, que tout nous était venu de là, et non pas seulement la civilisation dans le sens usuel du mot, mais jusqu'aux races et aux langues. Et cette doctrine a été enseignée partout, a fait loi partout.

Mais deux sciences nouvelles ont surgi : l'anthropologie et la préhistoire. Leur apparition a entraîné une révision générale de la linguistique et de l'ethnographie comparées, et une multiplication merveilleuse des études, recherches, fouilles, déchiffrements, confrontations, recoupements, etc., sous toutes les latitudes et longitudes. Ce travail, auquel ont collaboré des hommes relevant des nationalités, des religions, des écoles, les plus diverses, a eu ce résultat, entre bien d'autres, que la croyance en l'origine aryenne des races et des langues européennes est reléguée aujourd'hui parmi les théories simplement curieuses.

Devant les preuves qui se sont accumulées au cours de la dernière trentaine d'années, on ne saurait continuer à regarder l'Occident comme une colonie peuplée, aménagée, mise en valeur par des tribus émigrées de la haute Asie. Les Aryas étaient les frères, ou plutôt les cousins de nos ancêtres, et non point leurs pères. Il n'a jamais existé d'autre collectivité indo-européenne que ces inquiétants nomades, les Tsiganes ou Zingari, à qui par une amusante bizarrerie, on impose parfois la désignation d'Égyptiens (Gitanos, Gypsies).

Le mirage oriental n'est pas le seul préjugé, ou la seule légende, contre quoi l'on ait à réagir, lorsque l'on veut scruter l'antiquité de la France en général, de la Bretagne en particulier. On doit aussi se méfier du mirage celtique, ou du mirage gaulois, selon les écrivassiers dont l'on n'a pas pu éviter d'explorer le fatras. Il est vrai que, le plus souvent, l'on a affaire à un mysticisme gallo-celtique, ou celto-gaulois, comme on voudra, car la majorité des auteurs qui ont traité ces questions jusqu'à une époque en somme récente, n'ont pas hésité à confondre deux populations si dissemblables à tous égards, on pourrait même dire si antagoniques.

Mais ne nous laissons pas aller à de la polémique, et contentons-nous d'enregistrer les données fixées par des sciences qu'avaient oublié de consulter les auteurs en cause : la géologie et la géographie, l'histoire et la préhistoire, la paléontologie et l'anthropologie, l'ethnographie et la linguistique.

Les Celtes étaient trapus, de stature moyenne, sinon au-dessous de la moyenne, brachicéphales, c'est-à-dire à tête sensiblement sphérique et portée bien d'aplomb, avec un teint pâle, des yeux plutôt foncés que clairs, et des cheveux rarement clairs. Les Gaulois étaient grands, élancés, dolichocéphales, c'est-à-dire à tête ovoïde et portée comme si le poids du cervelet entraînait le vertex, le sommet de la tête, vers la nuque, avec un teint rosé, des yeux plutôt clairs que foncés, et des cheveux rarement foncés.

D'abord, les Celtes vécurent à l'état homogène sur ce que l'on appelle aujourd'hui l'archipel britannique, et tout l'ouest et tout le centre de la France. Ils étaient les descendants directs des tribus néolithiques de ces régions, des constructeurs de monuments mégalithiques de, par exemple, l'Armorique, l'Auvergne, les Cévennes. Et ces tribus elles-mêmes avaient représenté un stade d'évolution normale des derniers paléolithiques, des troglodytes magdaléniens, par exemple, du bassin de la Dordogne.

Les voisins méridionaux des Celtes étaient, vers l'est, les Ligures, et vers l'ouest, les Ibères. Les premiers, petits et secs, brachicéphales, au teint bistré, aux yeux sombres et aux cheveux noirs, occupaient le littoral méditerranéen entre la Catalogne et la Toscane, le bassin du Pô, les vallées des Alpes et du Jura. Ils avaient pour aïeux les néolithiques des tribus lacustres et, par celles-ci, les troglodytes de ce que les modernes ont baptisé la Côte d'Azur.

Les Ibères étaient secs aussi, et avaient aussi des cheveux noirs et des yeux sombres, mais c'étaient de grands diables, dolichocéphales et au teint cuivré. Ils habitaient les vallées des Pyrénées, l'Espagne et le Portugal, le Mâghreb. Leurs ancêtres étaient les néolithiques du continent englouti, de l'Atlantide Même ascendance que les prétendus Peaux-Rouges, dont le teint est toujours plus ou moins cuivré, dont la peau n'est jamais rouge.

Entre parenthèses, un sujet d'étonnement pour un chercheur indépendant et consciencieux, c'est que l'on ait pu si longtemps regarder comme un problème insoluble l'origine de la race et de la langue chez les suprêmes Ibères d'Europe, les Basques. Il n'eût fallu que comparer le cheveu, les yeux, les pommettes, le nez d'un Basque, avec ceux d'un Indien d'Amérique, les caractéristiques sentimentales et mentales des deux peuples, leurs plus anciennes traditions, mœurs, coutumes, et le prétendu mystère se serait dissipé. Surtout, il eût suffi de confronter les deux idiomes, de feuilleter quelques grammaires et vocabulaires, car il n'y a, entre le parler des Escualdunac et les dialectes des Peaux-Rouges, pas plus de différence qu'entre l'espagnol et le portugais, ou qu'entre l'italien et le roumain.

Celtes, Ligures, Ibères, ne furent naturellement pas toujours en paix, ni même souvent. Lors d'une guerre qui mit aux prises les deux premières nations, les Ligures, par les vallées du Rhône et de la Loire, s'avancèrent jusqu'en Armorique. On ignore la date de cet événement, mais l'on a de celui-ci des preuves nombreuses, en particulier dans la linguistique, dont trop d'écrivains ont abusé autrefois, et que l'on a ensuite, par une fatale réaction, négligée beaucoup trop.

Les noms que portent, ou qu'ont portés les accidents de terrain et les endroits habités, doivent être invoqués avec une circonspection extrême, la majorité n'étant que des qualificatifs qui varient le long des âges, selon la succession régionale des idiomes, ou des dialectes du même idiome. Par contre, il n'est pas rare qu'une désignation de cours d'eau demeure à peu près intacte à travers les siècles et les millénaires. Il y a là une anomalie, qui d'ailleurs n'est qu'apparente, comme toutes les anomalies, et dont il ne serait pas très malaisé de discerner la cause dans la psychologie collective.

Souvent un cours d'eau conserve le nom que lui ont donné d'antiques occupants de sa vallée, et qui, dans l'idiome de ceux-ci, avait simplement le sens de rivière. Ou bien, il a gardé le nom même des susdits occupants. Aussi rapporte-t-on aux conquérants ligures les noms de la Loire (Liger — rappelons qu'en étymologie les consonnes, ou leurs mutations dans les limites de leurs séries respectives, ont seules de la valeur —) et, en Bretagne, du Lizier ou rivière de Saint-Nolff, du Léverin, affluent du Niniam, du Léguer ou rivière de Lannion.

Les Ligures étaient, anthropologiquement parlant, si proches parents des Celtes, leur ressemblaient à tant d'égards, que les deux races ne tardèrent pas à fusionner sur les territoires envahis, et il en résulta cette race celto-ligurienne, ou liguro-celtique, dont descendent les populations modernes des Cévennes, de l'Auvergne et du Limousin, et qui prédomine encore en Bretagne.

La lutte eut plus d'envergure entre les Celtes et les Ibères. Chacun des deux peuples s'enfonça et fixa des colonies, au cœur du pays de l'autre. Mais le métissage qui s'ensuivit ne fut complet, aux points de vue espace et temps, que dans l'un des deux cas. Une race de Celtibères, ou d'Ibéro-Celtes, se forma : d'une part, dans la Gallice et le Portugal; d'autre part, dans les bassins de la Dordogne inférieure et de la Charente. Les communautés de Celto-Ligures et d'Ibères ne s'interpénétrèrent pas toujours en Bretagne, y restèrent juxtaposées dans maints districts. C'est pourquoi, par exemple, les gens des îles d'Ouessant, de Batz et de Bréhat, surtout ceux de Guissény et de Kerlouan (Finistère), ressemblent tant aux Basques, et si peu à des Bretons.

Ce n'est certes pas à dire que les Ibères aient occupé seulement les trois îles en question et le Lan-ar-Pagan. On appelle ainsi, « pays des païens », le territoire de Kerlouan et Guissény, et pour des motifs que nous verrons ultérieurement. Ils vivaient en nombre sans doute sur le littoral voisin des trois îles et aux alentours du Lan-ar-Pagan. Mais ils furent refoulés par les Celto-Ligures, quand ceux-ci durent céder sous la pression de nouveaux envahisseurs, les Gaulois.

Toutes les études et recherches auxquelles on s'est livré depuis une vingtaine d'années ont abouti à montrer les Gaulois comme les descendants des néolithiques de Scandinavie. Diverses personnes avaient déjà rôdé autour de cette identification, n'avaient pas osé se colleter avec elle, par crainte de heurter trop violemment des traditions sacro-saintes. Elles avaient observé que sont absolument interchangeables les descriptions que les auteurs grecs ou latins — en particulier Ammien Marcellin — donnent des Gaulois, et celles que les chroniqueurs du moyen âge donnent des Normands ; remarqué aussi une similitude étrange— en tout cas, unique dans l'histoire universelle — entre le caractère qu'affectait chez les Gaulois la passion des aventures lointaines et celui qu'il affecte plus tard chez les Normands. Et ainsi de suite.

Il est très difficile aujourd'hui d'hésiter à le reconnaître, les Gaulois représentent la première vague d'envahisseurs jetée sur l'Occident par les deux péninsules Scandinaves, les Gaulois et les Kymris ou Cimbros, c'est tout un.

Après avoir colonisé la Grande-Bretagne, ils s'établirent dans ce qui est devenu la Belgique et dans le bassin de la Seine. Puis ils exercèrent des poussées vers le sud et le sud-ouest, et il y eut désormais une race gallo-celtique, ou celto-gauloise, dans la Beauce, le Perche, le Maine, l'Anjou, pour ne citer que ces régions.

Sa langue fut la celtique, étant donné la puissance d'absorption qui a distingué les Celtes partout et toujours, et, au contraire, la faculté d'assimilation qui est comme spéciale aux Scandinaves. Les Celtes avaient déjà imposé leur parler à leurs conquérants ligures et ibères. Plus tard, ils agirent de même à l'égard de tous les étrangers qui immigrèrent, par exemple, en Armorique : les Phéniciens et les Vénètes, puis les Italiotes et les Gallo-Romains, puis les Gallo-Celtes d'outre-Manche et les Francs, puis les Saxons, les Normands, les Arabes. Par contre, l'idiome premier a été très vite abandonné par les Gaulois au milieu des Celtes de Grande-Bretagne, au contact des soldats, des fonctionnaires et des colons latins de notre pays, et dans le bassin du Pô — par les Goths en Italie et dans la France méridionale et dans la péninsule ibérique — par les Danois et les Norvégiens en Russie, en Grande-Bretagne, en France, en Sicile, en Hongrie. Actuellement encore, aux États-Unis, il suffit de deux générations pour noyer les Scandinaves dans la masse, tandis que les Irlandais forment un élément irréductible.

La confusion que l'on a faite longtemps entre les Celtes et les Gaulois avait l'une de ses causes principales dans l'unité linguistique réalisée, en Grande-Bretagne et chez nous, par les premiers aux dépens, pour ainsi dire, des seconds. Se trouvant en présence d'un seul idiome national pour la période préromaine, on déclarait : « Tel fut le parler de la race gauloise. D'ailleurs, il y a les Gallois et les Gaëls, comme il y eut la Gaule et la Gallice. » Et l'on aurait pu ajouter la Galicie, et la Galatie, et — pourquoi pas ? — les Gallas.

C'était un raisonnement équivalent à celui-ci : « La langue, dans le royaume des Francs et dans le duché de Normandie, était le français ; donc, le français était la langue originelle, et des Francs, et des Normands. »

Ajoutons un détail qui semble infime, et qui n'en fournit pas moins une indication saisissante. Les Armoricains sont par excellence le peuple chez qui un sentiment ne s'atténue jamais le long des siècles. Or, ceux d'entre eux qui ont abandonné le parler celtique sont, de temps immémorial, traités par les autres de Gallos, de Gaulois, et avec une nuance de mépris, qui donne au qualificatif un sens voisin de celui de traître. Comment ne pas reconnaître là l'inconsciente perpétuation d'un dualisme, d'une opposition, d'une hostilité ? Si les Celtes et les Gaulois avaient eu même idiome à l'époque de leurs tout premiers rapports, autrement dit, s'ils n'avaient constitué qu'une même race ou, à la rigueur, deux branches d'une même race, réussirait-on à expliquer ce qualificatif et ce mépris ?

Les Gaulois ne pénétrèrent pas dans l'Armorique. Les Gallo-Celtes, qui ont pullulé sur ses côtes septentrionales, descendent d'immigrants venus d'outre-Manche à divers moments du moyen âge, ainsi que nous le verrons. Mais la pression exercée par les Gaulois à l'ouest du bassin de la Seine, eut pour résultat indirect une modification profonde dans les conditions ethniques de la péninsule.

Les Celtes de la future Normandie ne s'étaient pas mélangés aux Ligures, n'avaient peut-être pas été atteints par la conquête ligurienne. Beaucoup d'entre eux ne se soumirent pas davantage aux Gaulois. C'étaient des Curiosolites, ou gens de la tribu de Courseulles, dans les bassins de l'Aure et de la Vire — des Osismins, où gens de la tribu d'Exmes, dans les hautes vallées de l'Orne, de la Dives, de la Touques et de la Risle — des Lexo viens, ou gens de la tribu de Lisieux, entre les Osismiens et la mer. Quelques communautés celtiques plus septentrionales, notamment les Ambiates ou Ambiliates, c'est-à-dire la tribu d'Amiens, manifestaient d'ailleurs presque autant de répugnance à subir la suzeraineté gauloise.

Des clans osismiens émigrèrent vers l'ouest, pour ne s'arrêter qu'à l'extrémité du continent, au nord de la grande tribu celto-ligurienne des Corisopites, sur le territoire qui devait s'appeler ultérieurement le Léon. Ce mouvement ne tarda pas à être suivi par des clans lexo viens, qui allèrent s'établir à l'est des colons osismiens, dans le Trécorois et le Goëlo d'aujourd'hui. Puis vinrent des Ambiliates, qui ne purent naturellement se porter au delà du Penthièvre. Les derniers à se mettre en marche, parce que, pour des raisons géographiques évidentes, leur pays fut le dernier attaqué, furent des Curiosolites, qui se fixèrent dans les vallées de l'Arguenon et de la Rance.

A la veille de la conquête romaine, les Osismiens avaient trois villes : Occismor (Exmes-de-la-Mer, Exmes-sur-Mer), là où est Saint-Pol-de-Léon; Tolente, dont les ruines se voient auprès de Plouguerneau; et la capitale, Morvan, Kermorvan, le Vorganium des Latins. Ses vestiges couvrent la presqu'île de Kermorvan, au Conquet, et sa « marine » était à Portzliocan (Staliocanum Portus).

Les Corisopites, c'est-à-dire la tribu de la Cornouaille, avaient leur capitale à Is, comme l'indique le nom que leur forgèrent les conquérants italiotes, et qui est une corruption de Ker-Is-Oppidum.

Les Lexoviens, les Ambiliates, les Curiosolites avaient leurs chefs-lieux respectifs à Lexovie (Le Yaudet), à Lamballe, à Corseul. Mais les Curiosolites possédaient, aussi un port, de premier ordre pour l'époque, Aleth (Saint-Servan).

Ils avaient pour voisins orientaux les Diablintes, ou tribu de Jublins (Coglès, Vendelais et Haut-Maine), qui, eux, faisaient bon ménage avec les Gaulois, comme ils avaient déjà fait avec les Ligures, et pour voisins du sud-est les Redons, tribu celto-ligurienne, dont l'agglomération majeure était Condate (confluent, Conflans), autrement dit, Rennes.

Avant l'exode d'une portion des Osismiens, des Lexoviens etc., l'habitat des Redons avait englobé la basse vallée de la Rance. L'accaparement final de ce district par les Curiosolites maintenait, entre les deux petites nations, cette discorde, qui est comme statutaire dans le monde celtique. D'autre part, les Redons et les Diablintes se disputaient le Vendelais. Curiosolites et Diablintes se battaient de temps en temps pour le Coglès. Curiosolites, Ambiliates, Lexoviens, parfois coalisés, plus souvent isolément, cherchaient à prendre ou reprendre aux Vénètes le Porhoët. Osismiens et Corisopites revendiquaient avec une égale énergie le Poher et sa ville de Vorgium (Carhaix), le Faou, Gesocribate (Brest).

Nous aurons à constater la prolongation séculaire de ces luttes, ou de conflits analogues, l'une des causes essentielles de la facilité — relative, si l'on veut, mais c'est tout ce que l'on peut accorder — avec laquelle le peuple armoricain perdit tant de fois son indépendance, au lieu de fonder une grande nation, comme il se trouva, en plusieurs occurrences, à même et sur le point de le faire.

Au sud-est des Redons, il y avait la tribu celto-ligurienne, devenue assez vite celto-gauloise, puis gallo-celtique, des Namnètes, avec leur capitale de Condovicnum au confluent de l'Erdre et de la Loire, et un port un peu en aval, Portus-Namnetum, ou Namnetum, dirent simplement les Romains. Cette tribu de Nantes ne vivait pas plus en paix que ses sœurs ou cousines. Elle avait souvent mailles à partir avec les Andes (Anjou) et elle s'acharnait à écarter de la basse Loire : d'un côté les Pictons ou Pictaves, qui n'entendaient pas renoncer au pays de Ratiatum (Retz, Rezé); de l'autre les Vénètes, qui résistaient ferme dans Grannona (Guérande) et ailleurs.

A proximité de Grannona et sur l'emplacement actuel de Saint-Nazaire, les Vénètes avaient concédé à des Phéniciens un terrain, où ceux-ci avaient bâti Corbilo, ville qui avait rapidement conquis le premier rang parmi les ports de la Gaule sur l'Atlantique. Le docte Pythéas, qui la visita vers la fin du ive siècle avant l'ère chrétienne, ou le début du me, et qui connaissait toutes nos côtes, la déclarait plus considérable que Narbonne au point de vue du commerce maritime, et presque aussi importante que Marseille, sa patrie. Les hardis navigateurs de Tyr avaient là une de leurs escales principales, et l'un de leurs grands entrepôts, sur la route de l'étain qu'ils allaient chercher aux Cassitérides (Sorlingues) et sur celle de l'Ambre.

C'est d'eux sans doute que les Vénètes apprirent à se risquer dans les longues traversées pour pratiquer l'échange en des contrées lointaines. En tout cas, cette tribu était, dans l'antiquité, run.i(|nc des petites nations armoricaines à posséder une mâtine qui ne lût pas utilisée pour le seul cabotage, et à ne pas commercer exclusivement avec ses voisines immédiates. Elle entretenait des relations avec l'archipel britannique et le  littoral septentrional et occidental de la péninsule ibérique.

Une telle activité avait eu pour conséquence la prospérité et celle-ci, à son tour, avait conservé ou rendu à la région la prépondérance dont elle avait joui aux temps néolithiques. La capitale, sous le nom probablement nouveau de Diaodoric, était restée ou redevenue la cité majeure de l'Armorique.

Prépondérance dont l'on se dépitait, prospérité génératrice d'envie et de jalousie. D'autant plus qu'avec ses amis et associés de Corbilo, cette tribu gênait fort la navigation et le commerce des Namnètes, et que les bateaux des Redons ne pouvaient atteindre la mer que par la Vilaine, dont le cours inférieur était dominé par les bourgs vénètes de Ratuma (Redon) et de Duretia (Rieux).

Il a constamment existé, pendant l'antiquité puis au moyen âge, un antagonisme entre les Vénètes puis les Vannetais et tous les autres Bretons. Il s'est manifesté de maintes sortes, nous le verrons. Mais les causes économiques et politiques ne suffisent pas toujours à l'expliquer. Il a sa source profonde dans une instinctive antipathie de race.

Les Vendes ou Vandales, car c'est tout un, qui vivaient jadis en Podlachie, qui débordèrent ensuite sur la Pologne, la Silésie et la Moravie, la Saxe et la Bohême, et qui subsistent en Lusace, étaient les plus vagabonds des Slaves occidentaux. C'est à eux que la Vénétie doit son nom, et leurs descendants sont nombreux encore à proximité de Venise, dans le Frioul. D'après eux également fut baptisée la Vandalousie, l'Andalousie, et ils conquirent jusqu'au Maghreb — pour le perdre d'ailleurs bientôt.

L'arrivée d'une horde vénète en Armorique a dû y précéder de très loin l'établissement de colonies liguriennes. Elle y a exercé une influence considérable.

On n'aperçoit pas la possibilité que l'ambre découvert dans les sépultures morbihannaises, datant du néolithique à son déclin, ait été apporté par des Phéniciens, tant de siècles avant que les marins de Tyr se fussent aventurés dans l'Atlantique. On peut admettre que sa présence témoigne de périples effectués par des Celtes ou des Scandinaves. Mais une hypothèse non moins plausible est celle de caravanes parties de chez les Vendes, qui vivaient alors auprès du pays de l'ambre, et dont l'on sait que c'est eux qui ont apporté celle matière précieuse jusqu'au littoral de l'Adriatique.

On ignore la provenance de la callaïs trouvée dans les mêmes sépultures. On connaît seulement que c'est une proche parente de la wavellite, recueillie dans le Devonshire et dans la Creuse; de la lazulithe, recueillie dans le Lincolnshire; de l'amblygonite, autre Creusoise; de la montebrasite, creusoise encore et mainiote. Mais quand l'on passe la revue, des phosphates d'alumine, comment oublier que la wavellile se rencontre aussi en Bohême et en Saxe, qu'il y a de l'amblygonite dans cette même Saxe, et que la turquoise abonde en Silésie ? Or, la Silésie, la Saxe, la Bohème furent des tout premiers pays qu'envahirent les Vendes.

Ce qui n'est pas hypothétique, ce qui est certain, c'est l'existence, dans le dialecte vannetais, de mots qui n'ont de frères, ni dans les trois autres parlers bretons, ni dans n'importe quel idiome de la famille celtique, et qui en ont dans la famille slave :

Arlec'houein, affiler; en tchèque, lestiti (lechtiti), polir. — Astizein, exhorter; en polonais, stezye, raidir. — Atahin, querelle; en tchèque, tahanice. — Atersein, rechercher; en serbe, trsiti, extraire. — Bastroulein, barbouiller; en polonais, bazgrac. — Blin, pointe ou coin; en polonais, en serbe et en tchèque, klin. — Dorc'hel, loupe ; en serbe, kvrga (kverga). — Foesk, mou, tendre; en serbe, vitak, souple, et vossak, cire. — Minôten, sentier, venelle, passage; en serbe et en tchèque, minouti, passer.

Et combien d'autres spécimens pourrions-nous donner !

Ajoutez que, dans la région vannetaise, plusieurs noms de lieu offrent une physionomie nettement slave. La désignation qu'infligèrent à Redon les Romains, Ratuma, et qui est l'évidente déformation de Ratum (Ratoum), fait penser à maintes agglomérations des pays jadis vendes : Radin, Radom, Ratibor, etc. Duretia  (Rieux), c'est-à-dire Duret (Douret), dérive de dvor, dwor, qui en toponymie slave équivaut à nos termes de château, castel, bourg. Une autre altération de dvor ou dwor a fourni Diaodoric. Divodvorec, en tchèque, signifie grande châtellenie, grand bourg, Granville. Ou bien : bourg des géants, à cause du Men-er-Hroëc'h, de la Table des Marchands, du Mané-Lud, de tous ces monuments dont l'on devait croire qu'ils n'avaient pu être construits qne par des espèces
de titans.

Les Vénètes de Bretagne étaient donc un peuple celto-slave, dont la conquête ligurienne compliqua plus tard les caractères physiques et moraux. Mais des Vendes encore inassimilés, ou décidément inassimilables, reprirent l'exode devant cette invasion. Exode forcément bref. Ils ne purent que s'égailler dans l'actuel Finistère. Il en résulta cette saisissante ressemblance entre, d'un côté, divers noms de lieu, divers costumes locaux, diverses coutumes locales, de la Cornouaille et du Léon et, d'autre part, les noms de lieu, les costumes, les coutumes, de la race slave, cette ressemblance que tout le monde a toujours constatée, dont personne jamais n'a daigné rechercher les raisons.

Elle est sensible spécialement à Pont-1'Abbé et aux environs, chez les Bigoudens. Là, quelqu'un qui connaît Pologne et Galicie, Bohême et Moravie, Croatie et Serbie, etc., se retrouve en plein milieu slave, y compris le type mongoloïde, si fréquent, parfois si accentué, chez les Slaves même occidentaux.

Cette sorte de fidélité aux caractères ancestraux, après tant de siècles et dans une ambiance si différente, s'explique par le fait que les Slaves, en général, s'assimilent médiocrement. Un exemple probant est celui que l'on rencontre sur la Côte d'Émeraude depuis quelques années. On avait caserne à Saint-Servan des soldats russes qui, lors de la première révolution survenue dans leur pays, avaient refusé de se battre plus longtemps, et dont l'on ajournait, et pour cause, le rapatriement. Quand cette mesure fut praticable, aucun d'eux ne se présenta pour en bénéficier. Ils cédaient à ce puissant attrait qu'exercé la Bretagne, et dont nous avons déjà parlé. La majorité d'entre eux épousèrent des Bretonnes, s'établirent de leurs métiers respectifs à Saint-Servan, Saint-Malo, etc., se firent naturaliser. Or, presque tous leurs enfants ont indiscutablement le type slave.

Celto-Slaves ligurianisés comme les Vénètes ou Celto-Liguriens comme les Corisopites, Celtes de sang à peu près pur comme les Osismiens, les Lexoviens, les Ambiliates et les Curiosolites, ou Celto-Liguriens gallicisés comme les Redons et les Namnètes les Armoricains, à la veille de la conquête romaine, pratiquaient tous la religion druidique. Elle était vraiment un lien national, ou plutôt prénational, l'unique d'ailleurs, entre les innombrables tribus, si disparates d'origine ou si métissées, qui vivaient sur le sol limité par l'Atlantique, la Manche, la mer du Nord, le Rhin, le Jura, Lyon, les Cévennes, Toulouse, et les Pyrénées centrales et occidentales.

La région qui s'étend au sud-est de ce vaste territoire avait perdu son indépendance depuis une soixantaine d'années, et se latinisait rapidement. Du reste, il y avait longtemps que l'influence des positifs, matérialistes Méditerranéens, apportée par les marins, commerçants et colons grecs, carthaginois, surtout italiotes, en avait évincé le druidisme, doctrine idéaliste par excellence, et base d'une culture éthique désintéressée.

Nous n'avons pas à parler ici de cette religion, car elle n'eut pas un caractère particulier en Armorique. Nous nous contenterons de signaler un détail. De même que, dans la suite des temps, la Bretagne devait fournir au christianisme français une très forte proportion de ses séminaristes et de ses prêtres séculiers, une plus forte encore de ses réguliers et principalement de ses religieuses, de même la péninsule était riche en instituts druidiques. Son importance valait celle que s'était acquise le pays des Carnutes, en ce qui concernait le recrutement, la formation et le rayonnement du sacerdoce, et les collèges de druidesses, établis dans Sein, Groix et Her (Noirmoutier), étaient les plus réputés de la Gaule. La deuxième de ces îles doit d'ailleurs son nom à cela : Groix, c'est Hroëc'h, Groac'h, vieille femme, d'où, au moyen âge, sorcière.

Quant à l'utilisation cultuelle des monuments mégalithiques par les druides, elle ne fut ni plus ni moins répandue en Bretagne que dans les autres régions de la Gaule. Et nous répétons qu'il était puéril d'en déduire, comme on le faisait jadis, que constructions étaient druidiques d'origine et de destination. Ou bien, il faudrait proclamer chrétiennes la destination et l'origine de tant de dolmens, de menhirs, etc., qui ont été adaptés au culte chrétien en Bretagne, comme nous le verrons.

Sources; bibliographie

* M.N BOUILLET : Dictionnaire universel d'histoire et de géographie. Librairie Hachettz et Cie. 1863.

* L. QUICHERAT et A. DAVELUY : Dictionnaire latin-français. Librairie Hachette.  (1868)

* André CHABOSEAU : Histoire de la Bretagne avant le 13è siècle. Éditions de la Bonne Idée. 1926.

 

hast buan, ma mignonig vas vite, mon petit ami

go fast, my little friend

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