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la racine *glennos = vallée

 

*François FALC'HUN, avec la collaboration de Bernard TANGUY : Les noms de lieux celtiques. Première série. Vallées et plaines. 


Chapitre IV


CELTIQUE COMMUN : * Glennos, «VALLÉE ».

GAÉLIQUE : Gleann, pl. Gleinn, Glinn, «VALLÉE ».

GAÉLIQUE : Gleannan et Gleanntan, «PETITE VALLÉE ».

GAÉLIQUE : Gleannach, «VALLONNÉ ».

GALLOIS : Glyn, pl. Glynnoedd, «VALLÉE ».

GALLOIS : Glan, pl. Glannau ou Glennydd, «RIVE ».

(cartes pp. 114-116)


En gallois, le nom de la rive, glan, contient les mêmes consonnes qu'un des noms de la vallée, glyn. Étant donné la fluidité du vocalisme celtique, bien attestée aussi par les noms de lieux gaulois, il serait sans doute téméraire de vouloir toujours distinguer à coup sûr, dans les toponymes français, les formes modernes des équivalents gaulois de glan et de glyn. Mais l'inconvénient est minime : rive et vallée sont des notions qui s'impliquent mutuellement.

Le Glandon, affluent de l'Arc (Savoie), ne peut correspondre qu'à un Glyn dwfn gallois, et signifie donc « vallée profonde », tout comme le Glandon, dont les eaux, par le Céor et le Viaur, se jettent dans l'Aveyron, puis la Garonne. La même explication vaudra pour le nom de la commune de Glandon (Haute-Vienne), dont le bourg est situé sur une hauteur dominant une rivière et un étang. En revanche, le village finistérien de Glandour sera un «bord de l'eau », identique au Glandwr gallois (one inch map 142, 26 x 33).

Le quartier de Glanret, «bord du courant », sur la Vilaine à Guichen (Ille-et-Villaine), mérite bien son nom aussi.

Mais la notion de rive appelant normalement un complément déterminatif, on sera plus porté à voir le nom de la vallée dans les toponymes suivants, dont les sites se prêtent à cette interprétation : Glaignes (Oise, de *glanià), Glainans (Doubs, dim. en -an), Gland (Aisne, Yonne), Glanes (Lot), Glannes (Marne), Glanum (la fameuse station archéologique des Bouches-du-Rhône), Glanges (Haute-Vienne, de *glania), Glanon (Côte-d'Or, dim.), Glanville (Manche), Glénic (Creuse, dim.), Glénac (Morbihan), Glénat (Cantal), Glénay (Deux-Sèvres), Glennes (Vienne), Glenouze (Vienne), Glun (Ardèche), La Roche-de-Glun (Drôme), Gléon (Aude, Glinum, Glenum vers 1160 et encore au XIVe siècle). Enfin l'Anglin, affluent de la Gartempe, ne serait que le mot glyn précédé de l'article celtique an.

De nombreux noms de villages de l'Ouest sont formés sur les mêmes racines. En Basse-Bretagne, il est possible que d'anciens *Kerglenn ou *Kerglen, « village de la vallée », se soient confondus, en vertu d'une mutation très régulière, avec les Kerlenn ou Kerlen, «village de l'étang » : seule la présence d'un étang ou les traces d'un ancien étang permettront peut-être un jour de les distinguer; et la distinction importera peu, car l'étang aussi suppose la vallée. Dans le Morbihan, on note cependant un Kergléno et un Glen-Strévélec (nom de ruisseau), à côté de Gland, Pont-au-Glannec, Glainville, la Ville-Glain, la Glanerie, la Gléhennaye. La Nomenclature des Côtes-du-Nord mentionne la Glanerie, le Glanger, la Glénehaie, la Glénière, la Glinais; celle d'Ille-et-Vilaine, La Glamary, la Glanerie, la Glénais, la Glinais et un Glen-Bihan, «petite vallée», qui fait penser que Glamary (pour *glen-mar-ia) pourrait signifier «la grande vallée».

Le Dictionnaire des lieux habités de la Loire-Inférieure cite le Gland, la Glandais, les Glands, la Glénais, la Glinais, la Ville-Glain.

Dans le Dictionnaire topographique de la Mayenne, on relève Glandier (« on prononce Glangué »), La Glannière, la Glannerie et le Glandsemé. Les deux derniers noms sont également portés par des ruisseaux, ce qui implique la présence de vallons.

Le même ouvrage cite encore les noms de hameaux suivants : Glaintin (4 fois, désigne aussi un ruisseau), La Glatinière, les Deux-Glatignés, Glatigné (3 fois, désigne aussi un ruisseau). Le premier nom se reconnaît dans le Glétin des Côtes-du-Nord et le Kerglintin du Finistère, ainsi que dans Glatens, nom de commune du Tarn-et-Garonne, dont dérive un autre nom de communes françaises, Glatigny (Manche, Oise, Moselle), ou de hameaux dans un domaine assez vaste. Glatigny, dans la Manche, se trouve auprès d'un ruisseau. Un hameau de Glatigny borde aussi l'Oise près de son confluent avec la Seine. Il doit s'agir ici de l'adjectif gaulois en -iacos dérivé du substantif attesté dans Glatens, le Glétin, Glaintain et Kerglintin, qui était le correspondant gaulois du gaélique gleanntan, «petite vallée». Une autre variante phonétique du même substantif serait attestée dans le nom de la Chapelle de Galattin, dans la vallée du Fier, au sud de Thônes (Haute-Savoie).

Mauritz Gysseling (Toponymisch Woordenboek, 1960) explique un Glatignies par « germ.-rom. Glattiniacas, «appartenant à Glatto». De leur côté, Dauzat et Rostaing (Dict. étym. des noms de lieux en France, 1963) reconnaissent dans Glatens un « om d'homme germanique * Glatto (allemand glatt, « poli ») et suffixe germanique -ing ». Mais, dans Glatigny, ils voient un «nom d'homme gallo-romain * Glastinius (du gaulois glasto, « vert ») et suffixe -acum ». Les autres noms de communes étudiés plus haut sont parfois rattachés au nom gaulois de la rive (Glaignes, Glennes), ou de la «vallée -> rivière » (Glannes), mais plus souvent expliqués par un nom d'homme, celtique (Glennus), gallo-romain (Glannius), germanique (Glawo, Gland, Glatto), par un nom commun, comme le thème « pré-latin g(a)l-, pierre rocher, hauteur», ou bien un mot désignant « un terrain où l'on glane, donc fertile » (pour Glénouze).

Dans Bouglainval (Eure-et-Loire), sur un affluent de l'Eure, il est vraisemblable que val traduit glain. Un village de Baglainval existe sur la Voise, affluent de l'Eure, entre Armenonville et Gallardon (Eure-et-Loire). Bouglainval a été expliqué par le nom de femme germanique Bauglind.

Il est surprenant, à première vue, de trouver Glénan comme nom d'un archipel au sud-ouest de Concarneau (Finistère). L'île centrale s'appelle Vieux Glénan, indice que Glénan la désigna d'abord exclusivement avant de s'appliquer à l'ensemble de l'archipel. Un chenal étroit et peu profond la sépare de sa voisine, l'île Guiautec, «Herbue». A défaut de vallon intérieur à Vieux Glénan, cependant plus basse au centre qu'au nord et au sud, ce chenal a pu être le vallon qui justifiait le nom à une époque où le niveau de la mer était plus bas en ces régions; et il le fut à une époque historique, comme le prouvent les menhirs d'une île du golfe du Morbihan aujourd'hui immergés à marée haute.

Le même mot se retrouve manifestement dans le nom de la commune de Glainans (Doubs), en 1147 Glaenens, que Perrenot (Toponymie burgonde p. 91) explique par un primitif Glaweningos, dérivé de Glawo, nom propre burgonde apparenté à l'ancien haut-allemand glauw, «intentus». L'explication a été reprise par Dauzat (Dict. étym.). Le bourg se trouve dans un vallon qui descend vers la vallée du Doubs, et l'interprétation par le diminutif en -an de glen, « vallée », s'impose à tout celtisant qui a vu le site de ses propres yeux.

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Le toponyme glen / glan  en Bretagne armoricaine (B5). 

B : St Brieuc; D : Dol; K : Cornouaille; L : Léon; M : St Malo; N : Nantes; R : Rennes; T : Tréguier; V : Vannes

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