Étymologie :
S'il est une ville de Bretagne armoricaine dont l'étymologie
a fait couler beaucoup d'encre, c'est bien Carhaix.
* OGEE, Dictionnaire de Bretagne, 1783 :
Carhaix ou Ker-aes
: " Nous avons sur l'origine de Carhaix
une dissertation que nous devons à M. Corret de
Kerbeauffret, officier au régiment d'Angoumois,
infanterie. Nous pensons que le public nous saura
gré de lui faire part des réflexions de ce
citoyen éclairé et estimable. L'opinion de ce
savant est combattue par M. l'abbé Ruffelet,
chanoine de l'église royale et collégiale de
Saint-Brieuc. et auteur de plusieurs ouvrages qui
ont eu du succès. Nous joindrons ici la
dissertation et la critique, afin démettre le
lecteur à même de choisir. Nous aurions bien
désiré avoir l'agrément de M. Corret à ce
sujet; mais il est absent et très-éloigné.
Nous osons croire qu'il ne s'offensera pas de
notre façon de faire. La critique de M. l'abbé
Ruffelet est si honnête, qu'on ne peut, sans
injustice, lui en savoir mauvais gré. D'ailleurs,
ces deux respectables écrivains se connaissent
et s'estiment mutuel- ... suite en
préparation.
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* Jacques Cambry, Voyage dans le Finistère, 1797/1799
:
Texte selon l'original. " Carhaix, Keraës, ou
Ker-Ahès, est un des points sur lesquels l'érudition
bretonne s'est le plus essayée. On a prétendu
qu'elle tenait son nom de la princesse Ahès,
fille de Conan Mériadec, ou du roi Gralon : elle
la fit bâtir, l'enrichir de deux beaux chemins ;
l'un d'eux menait à Brest, l'autre conduisait à
Nantes. On en voit encore des fragmens, nommés
en langue du pays, lient Ahès, chemin d'Ahès.
Le citoyen Corret a fait imprimer une brochure,
dans laquelle il prétend que cette ville est le
chef-lieu des Ossismiens : c'était, à son avis,
le Vorganium ou Vorgium de Strabon, de Ptolémée
, de Pitheas, de Pomponius Mêla, etc., malgré l'opinion
de Cluvérius et d'Argentré.
On a pris Keraës
pour le Keris des anciens, pour la ville d'Is.
Aélius, gouverneur des Gaules, général de
Valentinien III, en est le fondateur, suivant le
citoyen Corret, dont les recherches sont si
précieuses, et sur les ouvrages duquel je
pourrais ici m'étendre , si je ne connaissais
son extrême modestie. Il mérite des savans et
des littérateurs la profonde estime, que son
intrépidité , que ses connaissances militaires
lui méritèrent en Espagne, de tous les
grenadiers qui le suivaient , et qu'il guida
toujours à la victoire. l
I! n'est
aucune recherche que je n'aie faite pour voir les
bronzes antiques, les médailles, les débris de
colonnes, et les compartïmens en marbre dont on
parle à Carhaix, hélas! sans réussite; et je l'ai
déjà dit dans le catalogue que j'ai donné des
monumens du Finistère. L'acqueduc de Carhaix,
dont on prête la construction aux Romains, est
certainement un ouvrage gaulois, mais très-ancien.
Le
chanoine Deric, dans son histoire
ecclésiastique de Bretagne, fait venir
Carhaix de Kerc-haic , qui, selon lui, veut dire
perdrix".
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* Chevalier de Fréminville, commentateur critique de
Cambry, 1836
" l La Tour d'Auvergne,
en donnant a la ville de Carhaix une origine
romaine, a cédé i celte manie déplorable, trop
commune dans le dernier siècle, de vouloir voir
du romain partout. Quand reviendra-t-on donc de l'enthousiasme
exagéré que Lien des gens ont pour ce peuple
féroce! Carhaix n'a pu être fondé par Aëtius
puisque ce général romain ne vint jamais dans
la Bretagne, et qu'il est démontré qu'en s'avançant
a l'occident dans les Gaules, il ne fut pas au-delà
de Tours. Donc le nom véritable de celte ville,
son nom breton Ker-Ahès (ville d'Allés) ne peut
signifier ville d'Aëtius. Il est infiniment plus
naturel et plus probable de penser qu'il vient du
nom de la princesse Ahès, seconde fille du roi
Gradlon et qui la possédait en apanage.
Cherchons donc nos origines chez nous-mêmes et
n'allons pas torturer le bon sens et la
vraisemblance pour vouloir les trouver chez des
peuples étrangers. L'étymologie
donnée par Deric, qu fait venir le mot Carhaix
du breton Ker-Heic , qui veut dire perdrix, parce
que cet oiseau abonde aux environs, me paraît
une puérile'.
Au
surplus, il n'y a pas lieu de douter qu'une
phalange romaine ne se soit avancée jusqu'à
Carhaix, vers Tan 436, sous le commandement de
Litorius, lieutenant d'Aëtius, qui pénétra
dans le Finistère, y rendit quelques combat où
le sort des armes fut très-balancé et enfui y
fit avec ses troupes quelque séjour. On a
trouvé à Carhaix quelques débris de
constructions romaines, mais fort insignifiantes,
et quelques médailles.
Les
romains nommaient cette ville Vorganum. ; on y
voit un grand nombre de vieilles maisons,
construites en bois ou en colombage, dans le
style des 14% i5e et j6e siècles. Elles sont,
selon le goût du temps, ornées extérieurement
de bas-reliefs ou de petites statues dont
plusieurs sont remarquables pour leurs costumes
et leurs armures.
te
principal édifice de Carhaix est l'église de St-Tromeur,
commencée en 1529 et achevée de bâtir en i535.
Son portail est fort beau. Le fameux partisan
Fontenelle s'y était fortifié et avait fait de
cette église un de ses principaux postes.
M.
Souvestre dit dans une de ses notes qu'on voit
dans les soubassemens de l'église de St-Tromeur,
des traces de boulets lancés sans doute (dit-il)
lorsque Du Guesclin assiégea Carhaïx. Non-seulement
cet édifice, bâti en i535, n'existait pas
encore du tems de ce héros, qui vivait plus de
15o ans auparavant, mais encore de son tems l'usage
de l'artillerie était si peu répandu encore, qu'il
est douteux qu'il s'en soit servi au siège de
Carhaix en1i363.
L'église
collégiale de S*-Pierre, sise un peu en (U-hors
de la ville, est un très-ancien monument fondé
dans le sixième siècle. Les piliers et les
arcades de sa nef sont tout ce qui y reste de
celte fondation primitive ; tout le reste a été
ajouté dans les quinzième et seizième siècles.
Quoique
Carhaix eût été autrefois ville forte, il ne
reste plus aucun vestige de ses fortifications. (
F.)
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* Gwenc'hlan Le Scouëzec, Guide de la Bretagne, p
143 : "... la signification du mot Carhaix, en
breton Caraës ou Kara(h)es équivaut à "Ville d'Ahès"...".
Référence à la princesse Ahès.
* Léon Fleuriot, Origines, p 33 : " ...
nous savons que Louis le Débonnaire s'en fût (en 818)
jusqu'à Brisiaci silva (Briec) où il rencontra Matmonoc,
abbé de Landévennec. Il n'était donc pas loin de
Carhaix qui peut avoir été le Corophesium de ce texte.
L'ennui est que cette ville de Carofes, Carifes est dans
la Notitia provinciarum placée chez les Diablintes, avec
parfois la glose 'quae alio nomine Aliud uel Adalia
uocatur'. Ce problème compliqué semble en relation avec
l'origine du nom actuel de Karaes (Carhaix). Toutes les
formes Corophes, Carofes, Carifes, sont proches de la
forme du 12è siècle, Carahaes. L'existence de la
légende du roi Ohes de Carahes a déjà fait supposer qu'une
forme *Carohes a précédé Carahes; peut être Corophes,
Carofes ... sont-ils des formes plus anciennes encore d'un
même nom de lieu ..."
idem, note 87 : à propos d'une autre proposition de Mr
Quentel "Ce serait plausible, si les indices ne
concordaient pas en faveur d'une forme -ohes antérieure
à -ahès"
* Patrick Galliou et Bernard Tanguy, dans la plaquette Aux
origines de Carhaix : "Même si on rencontre
la graphie Caer Ahes entre 1081 et 1084, sans doute par
référence à la légendaire princesse d'Ahès, femme d'Ohès,
seigneur de Carhaix, il n'est pas douteux que la forme en
usage à cette époque est Carahes. C'est l'orthographe
usitée au XIIè (parallèlement à Karaes, Carh(a)hes et
Carhes) et au XIIIè siècle. Cette forme a elle-même
procédé de Carohes, variante qui remonte à un
antécédent Carofes, transcrit Corophesium par les
Annales de Lausanne qui indiquent, à l'année 818, que l'Empereur
Louis alla en Bretagne jusqu'à Corophesium. On sait par
la Vie de Saint-Gwennolé, écrite vers 880, que cette
année là Louis le Pieux, venu combattre le chef breton
Morvan, établit son campement au bord de l'Ellé, près
de la forêt de Priziac. Homonyme d'une localité de
Carofes mentionnée par la Notice des dignités de l'Empire
chez les Diablintes, c'est-à-dire en Mayenne, le
toponyme est à rapprocher de Charroux (Vienne), noté
Carofo sur un triens mérovingien, Karrofum, en 789,
Carrofense (monasterium), en 815. C'est de cette forme
dérivée Carrofens(em), d'un bas-latin carruvium, issue
de quadruvium 'carrefour' et du suffixe latin -en(em),
que procède Carofes. Carhaix/Karaez est donc un nom bas-latin
se référant à la fonction de carrefour routier de la
ville. Ce nom sera conservé par les Bretons, mais ils
useront parallèlement de celui de Caer."
* Bernard Tanguy, dans Dictionnaire des noms de
communes ...du Finistère : " ... Devenu
après la conquête romaine un important nud
routier, où convergeaient une douzaine de voies, Carhaix
ne prit pas, contrairement à la règle qui vit, aux
IIIè-IVè siècles, les chefs-lieux de cités adopter le
nom du peuple dont ils étaient la capitale, celui d'Osismi,
qui échut, pense-ton, à Brest. Mais la ville n'en
perdit pas moins son nom de Vorgion pour celui, bas-latin,
de Carofes. Attesté aussi au IVè siècle comme nom de
lieu de la cité des Diablintes (en Mayenne), le toponyme
remonte à une forme Carrofensis. Il s'agit d'un dérivé
formé avec le suffixe latin -ensis sur une forme simple
Carrofum - à l'origine de Charroux (Vienne) (Karrofum,
en 789, Carrofense monasterium en 815) - issue d'un bas-latin
carruvium, de quadruvium ' carrefour'. Carofes désigne
donc le 'lieu de carrefour'. Devenu Caro(h)es, puis Cara(h)es,
le nom sera interprété comme un composé formé avec le
vieux-breton caer, ce qui donnera naissance à la
légende d'Ohes, seigneur de Carhaix, puis à celle de la
princesse Ahes (d'où les noms Chemin-Noe (=Chemin-Ohes),
et de Hend-Ahes, donnés à d'anciennes voies rejoignant
Carhaix). Cette interprétation fut favorisée par le
fait que les Bretons usèrent parallèlement du mot vieux-breton
caer 'lieu fortifié' pour désigner la ville, comme en
témoignent les dénominations de Poher (Poucaer v.840,
Poucher en 871, Poher av. 1108) pour le 'pays', en vieux-breton
pou, et de Plouguer pour la forme 'paroisse', en vieux-breton
ploe. A côté de Ploguer en 1383, la forme pleine
Ploukerkarahes aux XVIe et au XVIIe siècle, pour
Plouguer, pourrait suggérer que Carhaix fut initialement
désigné en breton sous la nom de Caer Carofes 'le lieu
fortifié du carrefour'.
* Gwenc'hlan Le Scouezec (1997)
" Princesse ou
géante " Le nom de
Carhaix est évidemment celtique. Fut-il donné
à la ville par des émigrants bretons des Vè et
VIè siècles ? Ne remonte-t-il pas
plutôt aux Armoricains de la cité des Osismes,
dont la langue était sensiblement identique à
celle des Bretons ? Les émigrants, qui étaient
chrétiens, ont fondé, aux portes mêmes de la
ville et l'enserrant entièrement, un « plou »
qu'ils ont appelé Plou-guer, le « plou de la
ville », qu'ils n'ont même pas désignée par
son nom complet, peut-être pour éviter le
souvenir païen d'Ahès.
En
effet, la signification du mot Carhaix, en breton
Caraës (forme la plus ancienne attestée) ou
Kera(h)es, équivaut à « ville d'Ahès ». Ce
dernier mot lui-même a-t-il une signification
claire ? Pour certains historiens, « Ahès »
serait une contraction du nom des Osismes tel que
les Bretons, en arrivant dans le pays, l'auraient
perçu et Ker-Ahès signifierait alors tout
bonnement : ville des Osismes.
C'est
faire trop bon marché de la tradition constante
du pays, qui voit en Ahès une princesse (ou
déesse) légendaire, dont les traces sont
nombreuses dans la Bretagne intérieure. Un
premier indice nous en est fourni par les
toponymes semblables : il y a un hameau de
Carhaix entre Rohan et Bréhan-Loudéac, un lieu-dit
Corn-Carhai sur les roches de Portsall près de
Ploudalmézeau, et un village Caraës dans l'île
d'Ouessant.
C'est
cette tradition que suivait, au milieu du XVIIe
siècle, le jurisconsulte breton Eguiner Baron,
lorsqu'il écrivait : Exstat oppidum in comitatu
Cornualensi Armoricae Britanniae, ab Ahae
giganlis feminae nomine appellation Quer-Ahez,
qitod verbum sonat Villa Ahae, c'est-à-dire : «
11 existe dans le comté de Cornouaille, en
Bretagne Armorique, une place forte que, du nom d'une
femme géante Ahès, on appelle Quer-Ahez, nom
qui signifie Ville d'Ahès. »
On
remarquera que ce texte fait de la princesse une
géante. Or le principal personnage qui nous a
été conservé de la mythologie locale, dans la
mémoire populaire, est précisément un géant,
le Gawr, analogue au Gargantua gaulois et proche
parent, semble-t-il, du dieu solaire Belen, à
moins qu'il ne se confonde avec lui. Ahès
apparaîtrait alors comme sa parèdre".
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* Éditions Flohic (1998) :
"du bas latin carofes, lieu de carrefour,
puis interprété par la suite comme venant du vieux
breton caer, lieu fortifié, et de la princesse Ahes,
fille du roi Gradlon. Plouguer vient du vieux breton ploe,
paroisse, caer, ville fortifiée".
* Guide Michelin (2000) : "Kaer
signifie ville; Ahès
désignerait les Osismes, une tribu celte".
* Daniel Delattre (2004) : "Corophesium
au IXè; Kerahes au XIIIè pour Carhaix. Ploguer
au XIVè pour Plouguer. Carhaix-Plouguer serait l'antique
Vorgium. Carhaix semble tirer son nom du
breton "Ker-Ahès". Ahès était une princesse
bretonne, seconde fille du roi Gradlon".
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commentaires JC Even :
- Il est possible que par cacophonie et
cacographie, Carohès (= Carrouge), soit
devenue Ville Rouge, chez Alain Bouchart, d'où
la confusion avec Rennes, en ce qui concerne la position
de capitale de l'extrême ouest armoricain, à l'époque
de Maxime, et la focalisation des recherches du
débarquement de Maxime dans le Léon. Voir aussi l'article
de l'encyclopédie des noms de lieux consacré à Carrouge*
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