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Deuxième partie

 

3. Analyses et commentaires des textes

            

La Carmélide

 

           Repérage géographique

 

            Il s'agit, comme nous l'avons vu, d'un pays ainsi nommé de la Bretagne Bleue d'Armorique, c'est-à-dire de la Petite Bretagne (1). 

            L'étymologie de ce nom repose sur deux racines :

            - Car- : que l'on peut comparer au breton Ker, dont le sens ancien et véritable était de désigner une ville fortifiée, ou tout au moins un endroit habité défendu par des fortifications. On a beaucoup glosé sur cette racine et sur ce sens. Il n'en reste pas moins que, que l'on fasse appel à une racine celtique castrum, ou à une racine celtique kag-ro, on retombe de toute façon sur le thème d'un endroit fortifié ou protégé par une palissade, ce qui permet au premier degré toutes les confusions possibles. (2)

            - Mélide : qui est basée sur une racine gauloise mello- = colline + -ide (terminaison accusative ou collective). Cette syllabe -mélide désigne donc un pays dont la configuration dominante est celle de collines. (3)

            Ainsi, l'addition des deux racines confirme au moins sur ce point la configuration géomorphologique du pays voisin du côté sud du territoire breton d'Armorique, à savoir le pays de Carhaix, qui est précisément un pays de collines. Reste à savoir si l'ouvrage fortifié désigne la ville de Carhaix elle-même, ou un autre ouvrage fortifié situé dans les alentours. (4)

            Nous pouvons reconstituer le territoire de cette Carmélide en étudiant les contours des paroisses primitives du pays de Carhaix. L'analyse faite par Couffon, concernant le diocèse de Cornouaille, nous apporte déjà des éléments de réponse très intéressants. Il dit sans détour à propos de Maël-Carhaix que Trébrivan et Le Moustoir n'ayant aucune limite naturelle ni avec Plouguer et Treffrin sa trêve, ni avec Maël-Carhaix, l'ensemble ne devait au VIè siècle former qu'une seule paroisse avec Plouguer comme chef-lieu. Autrement dit, nous pouvons déjà regrouper dans le même territoire Plouguer, Carhaix, Treffrin, Maël-Carhaix, Trébrivan, et Le Moustoir. (5)

            A cela, il convient peut-être de rattacher la racine de Glomel / Glomael ( = la colline de la lumière ? la grande lumière ?), et par voie de conséquence, rattacher l'ensemble du plou primitif de Plévin, Tréogan, Paule, Glomel, Motreff. François Moal a très justement utilisé le terme de belvédère de la Bretagne pour désigner la ligne de crête du territoire de Paule. (6)

            A cela, il convient peut-être de rattacher la racine de Kergrist-Moëlou, et par voie de conséquence l'ensemble du plou primitif englobant Plougernével, Plounévez-Quintin, Bonen, Locmaria-Bonen, Rostrenen, Trémargat, et Kergrist-Moëlou (7). L'ensemble ainsi décrit constitue un territoire homogène.

            Pour des raisons géographiques évidentes, en dehors d'une identification étymologique abusive, il est nécessaire de rattacher également Maël-Pestivien, Bulat-Pestivien et Peumerit-Quintin, ce qui impose Duault (Dubs-Alt), Saint Servais, St Nicodème, et le Loch (8), car lorsque cette addition est faite, on observe que tout ce territoire qui est effectivement caractérisé par des collines se trouve situé à l'est de la rivière Hyères, depuis sa source située sur la crête des Monts d'Arrée jusqu'à sa confluence avec l'Aulne.

            Peut-on pousser l'identification de la Carmélide avec le Poher ? Cela est très probable compte tenu de la position centrale de la ville de Carhaix. Il ne faut pas oublier en effet que le nom breton entier de la ville est Ploukerkarahes, inversée en français en Carhaix-Plouguer. Les noms Poher (Pou-Kêr) et Plouguer (Plou-Kêr) présentent un radical commun : la ville (=ker) qui est à la fois le chef lieu du pays (pagus = pou > po) et du plou (9). Si Carohaise est bien la capitale de la Carmélide, il est vrai aussi que Carhaix est bien la capitale du Poher !

            Accessoirement, on peut d'ailleurs souligner le caractère absolument symétrique des deux racines -mello et let-av, qui servent à désigner respectivement dans cette même cité gauloise des Osismes, la première un pays de collines qui est celui de Carhaix, et la seconde un pays plat qui est le Léon.(10)

 

            Configuration géopolitique selon l'Histoire 

            Nous avons déjà traité de la question de l'évolution géopolitique des cités gauloises sous Dioclétien, Valentinien Ier, et Maxime. Nous savons donc que si la cité des Osismes conserve son homogénéité des points de vue politique, civil, et religieux, elle est désormais partagée en deux secteurs du point de vue militaire : des Bretons côté Manche, les Gaulois de la cité côté Atlantique, le tout sous la tutelle du comte siégeant en la capitale Carhaix. (11)

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